Roger Dérieux se révèle peintre des choses vivantes il y a quelques instants, peintre d’intérieur des choses qui s’ouvrent sur la mer, peintre d’une intimité libre acquise aux grandes passions, dont la force apparaît cependant toujours décantée, reposée et devenue utile à l’équilibre de l’ensemble.
Pierre Descargues, Arts, Paris
Roger Dérieux nous éblouit des magies de sa palette. Ses effets s’étendent des nuances les plus délicates aux accents les plus vifs, tout en restant dans une « tonalité » qui confère à l’œuvre une unité chromatique. Le sujet n’est là que comme un prétexte graphique à des symphonies colorées auxquelles on ne saurait rester insensible.
Georges Boudaille, Arts, Paris
L’accord des couleurs crée l’harmonie. La courbe y participe aussi, qui fait naître des formes rondes, pleines, généreuses. Dérieux compose en musicien préoccupé de lignes, de rappels, autant d’échos qui, par leur répétition régulière, suscitent un rythme ample. Certaines huiles séduisent d’emblée. D’autres s’entourent de mystère et ne se laissent que lentement pénétrer. Il en est ainsi pour Le Couteau. L’artiste atteint là un sommet : la couleur compacte, chaude, alliée à la forme large, la tonalité sourde des accords, tous les moyens plastiques convergent à la création d’une œuvre remarquable.
Jacques Monnier, La Feuille d’Avis, Lausanne
Dérieux semble construire ses tableaux avec facilité, avec virtuosité même. Les apparences ici encore sont trompeuses. Une telle peinture ne peut naître que d’une longue lutte avec la couleur et la lumière, rebelles comme toujours. Elle peut paraître facile : c’est de là que lui vient sa grande, sourde et exceptionnelle beauté.
François Pluchart, Combat, Paris
Roger Dérieux est un peintre attentif au phénomène de son époque, mais qui a le courage d’être ce qu’il est, sachant combien il est inconsidéré de vouloir combattre ses propres structures. Son œuvre se développe très en dehors du « up to date ». Solitaire, sans le craindre, en acceptant le prix, il approfondit son monde personnel, sans complaisance, sans l’idée d’une tricherie.
Dérieux aime le spectacle du monde… Mais il aime aussi ces espaces parallèles qui unissent les objets, ces coulées de silence où, pour un court instant, la rumeur s’apaise et le dialogue peut s’établir. Roger Dérieux croit, peut-être quelquefois s’efforce-t-il de croire, à la communication avec autrui. Si ses mots semblent trahir, si l’image souvent incertaine d’un monde intérieur non moins incertain, lui apparaît équivoque, alors il reste le pouvoir de communiquer à travers la tendresse, la douceur de ce monde…
En dehors des vaines classifications et des oppositions sans valeur, c’est là que réside, semble-t-il, la vraie signification de son entreprise.
Guy Weelen, Les Lettres françaises, Paris
Mais voilà une figuration aussi peu charnelle que possible. Un bras doré de soleil blanc, un toit serti de gris au milieu d’autres toits, les formes ne sont là que pour la lumière qu’elles contiennent ou projettent. Tout est pâle et brillant à la fois. Les couleurs sont froides, presque acides, des verts aigus, des jaunes translucides, des gris d’acier, des bleus d’eau. Mais l’ensemble est éclatant, vibrant presque, n’était-ce l’extraordinaire retenue, pudeur même du peintre.
Michèle Grandjean, Le Soir, Marseille
Roger Dérieux a hérité du cubisme l’éclatement du motif – natures mortes, paysages ou figures – en plans colorés. Ainsi, dans une série de variations autour d’une nature morte, il simplifie graduellement et réduit la densité de l’image jusqu’à ce qu’il n’y ait même plus une série de plans, mais la surface blanche de la toile sur laquelle il dispose avec une subtile retenue des objets à peine suggérés.
Thomas Neumann, Arts News, New York
La lumière limpide et comme filtrée de ses paysages, leurs formes abrégées ou simplement suggérées, la saveur du coloris, la distinction du dessin, révèlent à ceux qui ne connaîtraient pas Dérieux une nature exceptionnelle d’artiste. La réceptivité d’un Bonnard qui aurait entendu la leçon d’un Cézanne, alliée à la sensibilité d’un peintre d’aujourd’hui.
Frank Elgar, Carrefour, Paris
C’est le poète Francis Ponge, son ami, qui a le plus parfaitement défini, je crois, le sentiment qui se dégage des œuvres de Roger Dérieux réunies sur les cimaises de la galerie Jacob. Ce sont, nous dit Ponge, « les entretiens de la lumière du jour avec les formes et les couleurs ». Partout, en effet, cette lumière s’infiltre dans les formes et les choses, caresse l’architecture du paysage en la faisant passer du figuratif au surréel ; c’est une fête heureuse de la sobriété et du goût dans une palette jamais heurtée, à dominante de bleu et de gris.
René Barotte, Paris-Presse, Paris
C’est le motif de Salzbourg avec sa forteresse qui sollicite le regard à la fois étranger et familier de l’artiste parisien. Il utilise ce motif pour édifier un jeu de couleurs, l’inonde de lumière, ou l’assombrit, fait ressortir ses formes cubistes, puis estompe tout à nouveau dans une atmosphère irréelle.
Werner Thuswaldner, Salzburger Nachrichten, Salzbourg
On connaît l’œuvre du peintre Roger Dérieux, célébré par Francis Ponge, et l’on se doutait à la voir – en sachant aussi quel fut le contexte familial de son créateur – qu’il était poète. Ce qui frappe dans cette évocation, c’est une sorte de transparence accordée au charme de la ville. L’impression est accentuée par des dessins dont le contour, loin d’enfermer la vision dans une contrainte descriptive, capte comme une image idéale du lieu, ouverte sur la rêverie qu’il propose à ses visiteurs.
François Chapon, Bulletin du bibliophile II, Paris